La Renault RS10 de René Arnoux
Renault et la Formule 1 : une histoire d’audace et de passion
Si la Renault RS10 de René Arnoux est aujourd’hui considérée comme un pan de l’histoire du sport automobile mondial, c’est en partie car elle aura permis l’avènement en Formule 1 d’une technologie révolutionnaire pour l’époque : le turbo.


Quand l’audace ne rime pas toujours avec le succès…
Déjà présent dans de nombreuses compétitions automobiles, Renault voit dans la Formule 1 une vitrine internationale et un outil de promotion pour sa marque et son savoir-faire. Alors que les années 70 sont dominés par les moteurs atmosphériques de 3 litres de cylindrés, le constructeur français fait un choix audacieux : celui de concevoir un moteur turbocompressé de 1.5 litres. Si la solution est autorisée par la FIA, elle est cependant boudée par les autres équipes qui jugent la technologie trop complexe et pas assez fiable. Il en faut plus pour effrayer l’écurie française qui, sous l’impulsion de Gérard Larousse, Bernard Dudot et François Castaing, débute la construction d’une monoplace à moteur turbocompressé en 1976. La RS01 voit le jour un an plus tard et entre en piste lors du Grand Prix de Yellowstone en 1977.
Malgré le talent de son pilote, Jean-Pierre Jabouille, le véhicule ne rencontre pas le succès escompté. La faute à une fiabilité hasardeuse, pour ne pas dire catastrophique, qui vaudra à la RS01 le surnom de « Théière jaune » en référence à la fumée blanche qui s’échappait régulièrement de son moteur lors des abandons. En 1979, après deux saisons tumultueuses, la Renault RS01 tire sa révérence en cours de championnat au profit de celle qui entrera rapidement dans l’histoire du sport automobile : la Renault RS10.
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RS10 : sans maîtrise, la puissance n’est rien !
Là où la RS01 faisait office de prototype, la RS10 incarne la maîtrise de la firme au losange en matière de technologie de course. Si le véhicule embarque le même moteur V6 suralimenté de 1492 cm³ que sa prédécesseure, il se démarque par l’addition de 3 éléments : l’ajout d’un second turbo permettant de réduire le « turbo lag », l’amélioration de l’aérodynamisme via la conversion à l’effet de sol ainsi que l’amélioration globale de la fiabilité de la voiture. C’est cette addition qui permettra au constructeur français de résoudre l’équation du succès et de changer à jamais le visage de la Formule 1.
La RS10 entre officiellement en piste le 29 avril 1979 à l’occasion du Grand Prix d’Espagne, en même temps qu’un nouveau venu au sein de l’écurie Renault : René Arnoux. Au côté de Jean-Pierre Jabouille, le jeune Isérois tente de faire retentir la Marseillaise à Jarama. Sans succès, les moteurs des deux monoplaces en décidant autrement. La malédiction se poursuit lors des deux Grands Prix suivants, en Belgique et à Monaco, où les deux pilotes ne marquent aucun point. Mais impossible n’est pas Français, et les deux pilotes ne se laissent pas abattre.


Une première victoire qui rentrera dans l’histoire
Le 1er juillet 1979, à l’occasion du Grand Prix de France, Jean-Pierre Jabouille franchit la ligne d’arrivée du circuit de Dijon-Presnois en première position. L’événement marque la toute première victoire de l’écurie Renault et l’avènement du moteur turbocompressé en Formule 1. Si la victoire est belle, elle est cependant éclipsée par une lutte acharnée entre deux pilotes, deux nations et deux tempéraments : René Arnoux et Gilles Villeneuve. Ensemble, ils se livrent un duel d’une intensité rare. Les roues s’entrechoquent, les trajectoires s’effleurent. Le public retient son souffle. L’affrontement devient un symbole. Celui d’une confiance absolue en ses capacités et celles de son véhicule, mais aussi et surtout, dans celles de son opposant et ami. Au terme d’une lutte de 6 tours, Villeneuve décroche la seconde place tandis qu’Arnoux complète le podium. Deux français sur le podium, du jamais vu dans l’histoire de la Formule 1.
Le reste de ce récit appartient à l’histoire. Si la RS10 et ses pilotes continuent de performer durant le reste de la saison, la monoplace souffre toujours de problème de fiabilité. Elle sera remplacée par la Renault RE20 dès le début de la saison suivante, véhicule qui parachève l’avènement des moteurs turbocompressés dans le sport automobile. De son côté, René Arnoux quitte l’écurie Renault à la fin de la saison 1982. Il s’engagera dès 83 auprès de la Scuderia Ferrari, avec qui il remportera 3 Grands Prix et montera 9 fois sur le podium.